La fumée du cannabis davantage nocive que celle du tabac
Un mythe s'effondre. La fumée de cannabis contient nettement plus de goudrons, de particules nocives et autres substances cancérigènes que la fumée de tabac, et elle est impliquée dans la génèse des mêmes maladies: cancers des voies respiratoires, maladies des bronches, emphysème.
Qu'y a-t-il dans la fumée d'un joint ?
Le nombre de particules contenues dans la fumée de cannabis est impressionnant et leur toxicité plus ou moins importante. Dans la fumée d’un joint on trouve entre autre de l’ammoniaque, du cyanure d'hydrogène, des nitrosamines, du nickel, du polonium. Une étude récente vient de montrer que beaucoup de ces composés sont contenus en plus grande quantité dans la fumée de cannabis que dans celle de tabac. Par exemple, l’ammoniaque est présente à des niveaux vingt fois supérieurs dans le premier que dans le deuxième (7).
L’aluminium a été retrouvé à des doses biologiquement actives, c'est-à-dire potentiellement toxiques dans les deux types de fumées. De plus, on suppose que d’autres particules, telles que les hydrocarbures aromatiques polycycliques, les amines aromatiques et les N-hétérocycliques soient responsables en grande partie de l’action cancérogène de la fumée. La toxicité de ces composés a été montrée en bonne partie chez les animaux (7).
Est-ce que fumer du cannabis augmente donc le risque de cancers ? Même si certaines études épidémiologiques ne sont pas conclusives, d’autres suggèrent que oui, car la fumée de cannabis est corrélée avec l’apparition de certains cancers des voies respiratoires, comme le cancer du cou ou du poumon (2,3,4).
Maladies pulmonaires
Il a été démontré que le cannabis diminue la capacité de certaines cellules immunitaires des poumons (les macrophages) à se débarrasser des bactéries et des cellules tumorales (Baldwin).
Bon nombre de travaux démontrent une altération des bronches et des tissus pulmonaires par la fumée de cannabis (Tetrault) signalent des symptômes de maladie pulmonaire obstructive chronique (toux, expectorations, "wheezing") chez les fumeurs de cannabis à long terme.
La part exacte de la nocivité du cannabis est difficile à définir, car la plupart du temps il est fumé en étant mélangé au tabac, selon des modalités et doses très variables. Il constitue par là une porte d'entrée pour une dépendance parmi les plus tenaces: le tabagisme. |
Tabagisme et cannabis chez les jeunes
En Suisse, la part des jeunes de 15 ans ayant consommé du cannabis durant leur vie a diminué depuis 2010 et se situe en 2018 à 17.3% pour les filles et 27.2% pour les garçons (sources : addiction Suisse | 2018).
En France, si le cannabis est toujours répandu chez les adolescents, on observe cependant une baisse significative de l’usage : en 2017, près de quatre adolescents de 17 ans sur dix ont déjà fumé au moins une fois du cannabis au cours de leur vie (39 %). Après des fluctuations, c’est la prévalence la plus basse enregistrée depuis 2002. L’usage dans le mois et l’usage régulier (au moins 10 fois par mois) ont eux aussi diminué entre 2014 et 2017. Par ailleurs, en ce qui concerne le cannabis, l’âge d’expérimentation est stable depuis la fin des années 90 : 15,3 ans (sources : ESCAPAD 2017, OFDT) (8).
Enfin, parmi les usagers de cannabis à l’âge adulte (18-64 ans), 93,6 % n’ont jamais essayé d’autres drogues illicites.
De façon réciproque, le tabagisme à l'adolescence est une porte d'entrée pour la consommation de cannabis, et l'opportunité de consommer semble jouer un rôle important. Dans les écoles où le tabac est interdit la consommation de cannabis est également réduite (Enquête "Jeunes et drogues", 2006).
Les substances actives contenues dans le cannabis provoquent une dilatation des bronches, qui perment à une plus grande fraction de la fumée inhalée d'arriver dans les bronchioles terminales. A ceci s'ajoute la technique spécifique d'inhalation en bouffées profondes, favorisant une maladie particulière: des bulles d'emphysème géantes. Dans les 2 clichés de CT-scan suivants, pris chez des hommes jeunes, elles apparaissent comme de grandes plages noires. C'est un exemple extrême du risque présent.
Un article de Singh et coll. informe que les modifications apportées à l'ADN par la fumée de 3 à 4 joints/j. sont équivalentes à celles de 20 cigarettes fumées. Le composant incriminé est l'acétaldéhyde, un composant cancérigène. Le cannabis est donc sérieusement soupçonné de pouvoir induire des cancers chez l'Homme.
Références
- Tetrault et coll. (2007) Effects of Marijuana Smoking on Pulmonary Function and Respiratory Complications. Arch Intern Med. 167:221-228.
- Phan et coll. (2005) Lung bullae and pulmonary fibrosis associated with marijuana smoking Australasian Radiology 49:411–414.
- Johnson et coll. (2000) Large lung bullae in marijuana smokers. Thorax 55:340-342.
- Enquête "Jeunes et drogues". CRIOC(Belgique) | Fondation Rodin, Septembre 2006
- Baldwin et coll. (1997) Marijuana and cocaine impair alveolar macrophage function and cytokine production. Am J Resp Crit Care Med 156(5):1606-1613.
- Bandolier (2006) Does smoking marijuana cause lung cancer?, 150-3.
- Singh R et coll. (2009) Evaluation of the DNA damaging potential of cannabis cigarette smoke by the determination of acetaldehyde derived N2-ethyl-2'-deoxyguanosine adducts. Chem Res Toxicol. 2009 Jun;22(6):1181-8.
- Sources : https://www.drogues.gouv.fr/sites/drogues.gouv.fr/files/atoms/files/mildeca_dossier_lessentiel-sur-jeunes-et-cannabis_2019-07_def.pdf